L’homme fait certes partie de ceux qui ont battu le record de longévité à la tête d’un organe étatique, mais son départ intervenu mercredi dernier a surpris tous les acteurs de la réponse au Vih. Dr Ibra Ndoye, qui fut patron du Programme national de lutte contre le sida (1986) jusqu’au changement institutionnel intervenu en 2001 faisant du programme un Conseil national de lutte contre le sida (Cnls), a laissé la place à Safiatou Thiam, à la faveur d’un arrêté, signé par le Premier ministre Aminata Touré.
Le Conseil national de lutte contre le sida (Cnls) a une nouvelle patronne. Safiatou Thiam, ancien ministre de la Santé sous Abdoulaye Wade, a été en effet promue au poste si convoité de secrétaire exécutif du Cnls à la faveur d’un arrêté de la Primature, signé mercredi dans la soirée par le Premier ministre. Aminata Touré dite «Mimi» vient ainsi de matérialiser un souhait longtemps nourri dans les coursives du ministère de la Santé et de l’Action sociale, depuis le magistère de… Safiatou Thiam. C’est un secret de polichinelle que la longévité de Ndoye à ce poste faisait grincer des dents, parce que l’institution, dont il était le Secrétaire exécutif, brassait beaucoup de milliards de francs Cfa du Fonds mondial.
L’homme avait fini par imposer sa marque et jouissait de la confiance des bailleurs, pour avoir été au cœur de la lutte contre le sida depuis la découverte du Vih, en 1986. Après le Programme national de lutte contre le sida créé dès l’apparition du virus, pour contrôler la transmission au Sénégal, il a été porté à la tête du Cnls avec le changement institutionnel intervenu en 2001, suite à un appel à candidatures. Ainsi, de «médecin des prostituées», Dr Ibra Ndoye est passé patron d’un Conseil national plus vaste et plus ambitieux.
Le Quotidien, qui a voulu percer le mystère qui entoure le départ de Ibra Ndoye, a appris de plusieurs acteurs de la lutte contre le Sida que la décision a pris tout le monde de court, même si Dr Ndoye s’y attendait depuis le mois de décembre passé. «On a été surpris» est le terme qui revenait le plus souvent des acteurs de la réponse, joints hier par téléphone. Néanmoins, chacun a voulu lire la mesure, selon son niveau d’information.
Un départ, plusieurs interprétations…
D’abord, nos interlocuteurs ont fait remarquer que la mesure de Mimi Touré pose problème pour la bonne et simple raison que le poste, créé en 2001, doit nécessairement faire l’objet d’un appel à candidatures et non d’une simple nomination par arrêté. Ensuite, elle intervient au moment où le Sénégal est en pleine négociation avec le Fonds mondial pour le financement du reste des activités prévues dans le Plan stratégique national de lutte contre le sida (2011 – 2015). Un plan hautement important qui, pour rappel, s’inscrit dans une perspective de renforcement des acquis de la prévention et l’amélioration de la prise en charge des personnes vivant avec le Vih et des groupes vulnérables.
C’est d’ailleurs grâce à ces négociations que la décision de le faire partir en décembre dernier a été finalement rangée dans les tiroirs. Même Macky Sall, nous a-t-on confié, n’a jamais été pour le départ de Ndoye avec qui il a travaillé en tant que Premier ministre et président de fait du Conseil national de lutte contre le sida. En tout cas, pour certains acteurs aussi bien de la société civile que de l’Etat, il aurait été «beaucoup plus courtois» de le laisser finir le travail qu’il a entamé dans le cadre du Plan national, avant de le faire partir avec les honneurs. Parce qu’on le veuille ou pas, l’homme est une sommité mondiale, reconnue pour son engagement dans la réponse au Vih au Sénégal et son sens de la négociation pour l’obtention de financements est reconnu de tous.
Aly FAL journal lequotidien