La Syrie s’est dite prête dimanche à favoriser un accès humanitaire comme le souhaite la résolution de l’ONU adoptée samedi, mais seulement si sa souveraineté est respectée. Militants et ONG sont sceptiques.
Damas s’est dit prêt dimanche à coopérer à la mise en oeuvre d’une résolution de l’ONU sur l’accès humanitaire si sa souveraineté est respectée, militants et ONG exprimant de leur côté leur scepticisme, aucune sanction n’étant prévue en cas de non-application. Cette résolution non contraignante a été adoptée samedi par le Conseil de sécurité à une rare unanimité, la Russie, fidèle alliée du régime de Bachar al-Assad, ayant finalement accepté de voter une version amendée du texte, après avoir fait planer la menace d’un veto. La résolution 2139 appelle toutes les parties au conflit à lever immédiatement les sièges des zones peuplées et réclame la fin des attaques contre les civils. En outre, elle «exige que toutes les parties, et en particulier les autorités syriennes, autorisent sans délai un accès humanitaire rapide, sûr et sans entrave». Dimanche, le ministère syrien des Affaires étrangères s’est dit «prêt à coopérer avec le représentant de l’ONU (en Syrie) et les organisations humanitaires internationales afin de (trouver) les mécanismes garantissant l’application de la résolution». Il a néanmoins mis en garde, soulignant que sa mise en oeuvre devait se faire dans «le respect de la souveraineté nationale, du rôle de l’Etat et des principes de neutralité et d’honnêteté».Damas a par ailleurs estimé nécessaire que «les causes de la crise humanitaire» soient traitées, dénonçant «le terrorisme soutenu par l’étranger». A cet égard, il s’est félicité que la résolution «condamne fermement les attaques terroristes menées par des organisations liées à Al-Qaïda». Le régime syrien accuse, depuis le début du conflit en mars 2011, l’ensemble des rebelles d’être des «terroristes» soutenus par l’étranger.
Insurrection armée
Au départ pacifique, la révolte en Syrie s’est transformée en insurrection armée après avoir été brutalement réprimée. Des déserteurs et civils ont pris les armes pour lutter contre le régime, avant d’être rejoints par des jihadistes dont certains liés à Al-Qaïda. Sur le terrain, les militants exprimaient pour leur part leur scepticisme quant à une mise en oeuvre de la résolution, le texte –âprement négocié par Moscou– ne prévoyant pas de sanctions automatiques en cas de non-respect. La résolution laisse ouverte la possibilité d’agir ultérieurement, mais il faudra alors une nouvelle décision du Conseil, que bloquerait à coup sûr la Russie. «Nous aimerions vraiment que les corridors humanitaires deviennent réalité, mais j’en doute vraiment, notamment parce que la résolution n’inclut pas de sanctions», a déclaré un militant de Douma, près de Damas. «Nous voulons des actes, pas des mots et des promesses dénuées de sens», confiait de son côté Abou Ziad, un militant qui vit dans un des quartiers rebelles assiégés depuis plus de 18 mois par l’armée à Homs (centre), où une opération humanitaire, négociée par l’ONU, avait pu être menée durant quelques jours en février. Selon l’ONU, 200’000 personnes sont ainsi assiégées dans les zones contrôlées par le gouvernement et 45’000 dans celles contrôlées par l’opposition. Nadim Houry, de l’organisation Human Rights Watch, a jugé de son côté que si cette résolution constituait «une avancée politique», «ce ne sont pas des mots qui nourriront les Syriens» privés de vivres.Sans la menace de sanctions, «il revient aux alliés de la Syrie, en particulier la Russie et l’Iran, de s’assurer que le gouvernement syrien (…) cesse d’affamer les gens, comme arme de guerre». Le conflit a fait plus de 140’000 morts en près de trois ans et plusieurs millions de déplacés et réfugiés, selon l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH). Dimanche, les violences ont encore fait des dizaines de victimes. Deux personnes ont notamment été tuées dans un attentat à la voiture piégée contre un hôpital à la frontière turque, a indiqué l’OSDH.