Le passage de pouvoir a lieu ce mardi à Matignon. Manuel Valls, Premier ministre fraîchement nommé, a pris la place d’un Jean-Marc Ayrault sur le départ. «Le président de la République a tracé une feuille de route pour aller encore plus loin, plus vite», a déclaré Manuel Valls, soulignant avoir conscience de la demande de «justice sociale» des Français après la débâcle électorale.
Il a rendu hommage au Premier ministre démissionnaire, l’assurant qu’il poursuivrait le «travail engagé au service du redressement». Jean-Marc Ayrault, qui a décrit une «tâche éprouvante, exigeante, mais en même temps exaltante», a été longuement et chaleureusement applaudi par le personnel de Matignon debout dans la cour.
Selon son entourage, le nouvel hôte de Matignon, qui a désigné Véronique Bédague-Hamilius comme directrice de cabinet -première femme à ce poste à Matignon- devait poursuivre ses consultations en vue de la formation du gouvernement, dont la composition devrait être dévoilée mercredi au plus tard. Cette équipe sera «resserrée et paritaire évidemment», a-t-on précisé.
Le premier Conseil des ministres du gouvernement Valls devrait se tenir jeudi. Consultant par téléphone, depuis lundi soir, Manuel Valls a reçu mardi matin Place Beauvau le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, qui souhaite conserver son poste.
Entrée de ministres d’Europe Ecologie-Les Verts
Bien que les ex-ministres écologistes Cécile Duflot et Pascal Canfin ont déjà dit qu’ils n’en seraient pas, on semblait s’orienter mardi après-midi vers une entrée de ministres d’Europe Ecologie-Les Verts (EELV) dans l’équipe Valls après une rencontre d’une délégation du parti avec le nouveau Premier ministre. Ce dernier s’est engagé sur le processus entamé sur «la transition énergétique», des actions en faveur de la «justice sociale», et de la «décentralisation», trois thèmes chers aux écologistes, a fait valoir son entourage.
Il restait toutefois à trancher de nombreux points, notamment le remplacement de Manuel Valls à l’Intérieur. Pour ce poste circulent les noms de François Rebsamen et de Jean-Jacques Urvoas, un proche de Valls, qui préside la commission des Lois à l’Assemblée nationale.
La stabilité pourrait prévaloir au Quai d’Orsay avec le maintien de Laurent Fabius. Quel sera le nouveau visage de Bercy?
Pierre Moscovici a annulé mardi sa participation à une réunion importante de ses homologues de la zone euro, à Athènes, préférant attendre à Paris d’être fixé sur son sort.
Lors de la composition du gouvernement Ayrault, celui qui avait pourtant dirigé la campagne du candidat Hollande avait été «prévenu le dernier», rappelait son entourage.
Quid de Christiane Taubira
De son côté, Vincent Peillon (Éducation), est donné partant à coup sûr, il est candidat aux élections européennes dans le grand Sud-Est. Quant à Christiane Taubira (Justice), son départ de la Place Vendôme fait peu de doute même si elle pourrait obtenir un autre portefeuille, comme la Culture par exemple.
Le retour au gouvernement de Ségolène Royal continue d’alimenter les spéculations. L’ex-compagne du chef de l’Etat, mère de ses quatre enfants, n’a plus siégé au gouvernement depuis 2002.
Selon des proches, elle pourrait hériter de la Justice ou d’un grand ministère regroupant Ecologie, Transports et Logement, après avoir été pressentie pour l’Education. Mais cette dernière attribution semble également convoitée par Aurélie Filippetti (Culture). Najat Vallaud-Belkacem, intéressée par la Culture, devrait probablement abandonner le porte-parolat.
Actuel ministre délégué à l’Economie sociale et solidaire, Benoît Hamon pourrait se voir attribuer un grand ministère pour donner des gages à la gauche du PS, particulièrement critique sur la nomination de Manuel Valls.
Des parlementaires de différentes sensibilités du parti ont programmé des réunions depuis lundi pour discuter de ce que sera leur attitude à l’égard de Manuel Valls.
Traumatisés par la défaite des municipales, une large part des députés PS se refusent à le suivre aveuglément.
«Valls part avec un handicap»
Selon l’un d’eux, Olivier Faure, Manuel Valls, «part avec un handicap», l’«absence de confiance» d’une partie de la gauche et des écologistes, qu’il doit «compenser» par des «actes forts».
Les «reconstructeurs» du Parti socialiste, dont des proches de Martine Aubry, ont indiqué être dans une «confiance exigeante».
Reste à connaître l’identité des éventuels nouveaux entrants socialistes. Sont cités les députés socialistes Thierry Mandon, Karine Berger ou encore le sénateur de l’Isère André Vallini et parmi les ténors du PS, Bertrand Delanoë, qui avait déjà été annoncé à la Justice en 2012.
Si les discussions avec les écologistes se poursuivaient, plusieurs noms circulaient pour de possibles entrants; ceux de des députés François de Rugy, Barbara Pompili et Eva Sas ou du sénateur Jean-Vincent Placé. Hors de la galaxie EELV, celui de Nicolas Hulot revient également avec insistance.
Bruno Le Roux (PS) a, quoi qu’il en soit, souhaité que les écologistes figurent dans le nouveau gouvernement, après le «bon travail» commun des 18 derniers mois. Quant à son collègue député Jean-Christophe Cambadélis, il a assuré que Manuel Valls ne serait pas «le droitier de service».
Malgré son omniprésence médiatique, notamment lors de son duel avec Dieudonné, Manuel Valls quitte le ministère de l’Intérieur sur un bilan mitigé et laisse à son futur successeur plusieurs réformes délicates en chantier.
afp/Newsnet)