Le gouvernement ukrainien a déclenché dimanche une «opération antiterroriste» dans l’est du pays contre les insurgés pro-russes, dont l’offensive porte selon Kiev toutes les marques d’une implication de Moscou.
«Le sang a été versé dans la guerre que la Russie livre à l’Ukraine», a affirmé le président ukrainien par intérim Olexandre Tourtchinov dans un discours à la nation, ajoutant avoir ordonné «une opération antiterroriste de grande envergure» pour mettre fin à ces troubles.
Selon le ministre de l’Intérieur Arsen Avakov, l’opération, entamée dimanche matin, a fait «des morts et des blessés des deux côtés». M. Avakov a ajouté que la contre-offensive ukrainienne était principalement concentrée sur Slaviansk, où un groupe armé s’est emparé samedi des locaux de la police et des services de sécurité (SBU), hissant le drapeau russe.
40’000 Russes en embuscade
Les autorités ukrainiennes avaient également donné jusqu’à lundi 06h00 GMT (07h00 en Suisse) aux séparatistes pour déposer les armes et quitter les bâtiments publics qu’ils occupent dans l’est du pays.
Ces affrontements rappellent le scénario qui s’est déroulé en Crimée en mars et font craindre que la Russie, qui a massé quelque 40’000 hommes à la frontière, ne saisisse le prétexte de ces troubles pour intervenir sur le territoire ukrainien.
Dimanche, des manifestations pro-russes mais aussi pour l’unité de l’Ukraine ont eu lieu dans différentes villes de l’Est. A Marioupol, les manifestants se sont emparés sans résistance du siège de l’administration locale, hissant le drapeau de la «république de Donetsk».
Réunion du Conseil de sécurité
A Kharkiv, des incidents entre manifestants des deux camps, ont fait une cinquantaine de blessés et des pro-russes ont bloqué les locaux du conseil régional.
A New York, le Conseil de sécurité des Nations unies devait se réunir en urgence dimanche soir à 20h00 locales (01h00 en Suisse lundi) pour évoquer la situation dans l’est du pays, a annoncé l’ONU. La réunion a été demandée par la Russie, «pour faire valoir l’argument selon lequel les dernières déclarations de l’Ukraine sur l’opération sont une menace pour la paix et la sécurité», a précisé un diplomate occidental en poste à l’ONU.
La Russie a appelé dimanche les autorités de Kiev à cesser «la guerre contre leur propre peuple», se déclarant indignée par les menaces du gouvernement de recourir à l’armée. Moscou compte aussi rapporter la situation à l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).
L’ambassadeur des Etats-Unis à l’ONU, Samantha Power, a estimé que les attaques de groupes armés pro-russes portaient «tous les signes d’une implication de Moscou». De son côté, l’Union européenne a sommé la Russie de cesser toutes les tentatives de déstabilisation et invité Kiev à continuer à montrer de la retenue.
Burkhalter lundi sur le terrain
Dans un communiqué, l’OSCE a appelé dimanche toutes les parties à agir pour réduire les tensions. Le conseiller fédéral Didier Burkhalter, président en exercice de l’OSCE, a exprimé ses préoccupations concernant des incidents dans les régions de Donetsk et Kharkiv.
Didier Burkhalter est attendu en Ukraine lundi. Des contacts avec les autorités provisoires sont prévus, ainsi qu’une visite de la mission d’observation déployée par l’OSCE dans le pays.
Samedi soir, dénonçant des attaques «orchestrées et synchronisées», le secrétaire d’État américain John Kerry avait averti son homologue russe Sergueï Lavrov que Moscou devrait faire face à des «conséquences supplémentaires» si la tension ne retombait pas.
Réunions
Des pourparlers Russie/Ukraine/Etats-Unis/UE sont annoncés jeudi à Genève, mais la Russie a douché samedi cette lueur d’optimisme en affirmant que rien n’était arrêté.
Moscou n’a jamais reconnu le gouvernement provisoire, pro-européen, arrivé au pouvoir à Kiev après le renversement fin février du président pro-russe Viktor Ianoukovitch.
Les ministres des Affaires étrangères de l’UE doivent se réunir lundi à Luxembourg pour décider des suites éventuelles à donner à ce regain de tension. Ils évalueront aussi les conséquences de la menace de Moscou de couper les livraisons de gaz à l’Ukraine.
(afp/Newsnet)