Tambacounda, 3 fév (APS) – L’artisanat se cherche un nouveau souffle à Tambacounda (est), une région dans laquelle ce secteur peine à décoller, handicapé qu’il est par un déficit d’exposition. Une situation pas des plus favorables pour attirer de la clientèle.
Situé au cœur du quartier Liberté, en face de l’état-major des sapeurs-pompiers, le centre artisanal de Tambacounda regroupe tous les corps de métiers liés à ce secteur, des sculpteurs aux teinturiers, en passant par les bijoutiers et autres cordonniers.
Il se distingue des édifices mitoyens par son architecture caractéristique avec ses cases rondes de petites tailles couvertes de pailles. Seuls le restaurant et le bâtiment administratif, de styles différents, sont recouverts d’une tôle de zinc.
Près des deux entrées principales du centre, des plaques en fer rongées par la rouille, sur lesquelles on peut lire en gros caractère, couleur bleue sur un fond blanc : “Centre artisanal de Tambacounda”.
Un état de vétusté qui renseigne sur les difficultés du secteur dans cette région dont la position géographique peut être un atout pour sa promotion.
A l’intérieur du centre, plus d’une dizaine d’ateliers sont installés les uns face aux autres. Un couloir, sorte d’allée, conduit aux produits exposés dans les différentes cases.
Dans la cour, le calme et l’absence d’animation frappent, hormis quelques sculpteurs qui s’activent autour d’objets à polir, beaucoup d’artistes autour du thé, en attendant un potentiel client.
“Rien ne marche ici, à part les quelques sculpteurs qui sont en train de travailler dans des situations que vous constatez”, lance Thiané Guèye Thiam, cheffe du Centre artisanal de Tambacounda.
“Quand on entre dans une ville, l’artisanat doit être visible, [le visiteur] doit avoir une belle vision, les tableaux au niveau des deux entrées du village en disent long sur la situation de ce centre”, explique Mme Thiam à propos des deux plaques en fer de l’entrée du centre artisanal.
Elle ajoute : “Ces tableau doivent montrer qu’ici, il y a des artisans, c’est un village artisanal. Lorsqu’on y entre, on doit voir que les activités artisanales marchent. Mais seuls les sculpteurs travaillent, tout le reste, rien. Les teinturiers, les bijoutiers, les cordonniers, les peintres, rien ne fonctionne”.
L’Etat fait ce qu’il peut à travers ses démembrements, affirme Thiané Guèye Thiam, rappelant que le centre artisanal de Tambacounda, pour sa réfection, avait bénéficié, il y a trois ans, d’un financement de 5 millions de francs CFA du Conseil sénégalais des chargeurs (COSEC).
Mais à part la peinture qui a été refaite, depuis trois ans, il n’y a rien. “Les choses sont restées en l’état”, déplore Mme Thiam. Et de rappeler qu’avant son arrivée à sa tête en 2016, le centre avait déjà bénéficié d’un financement de “7 millions de francs” CFA de l’Agence pour la promotion et le développement de l’artisanat (APDA).
La vie continue, malgré tout, avec quelques artisans sculpteurs et créateurs de bracelets comme Dior Guèye, qui réalise des bracelets à l’aide de cauris, vendus à 1000 francs CFA la pièce.
“Il y a plusieurs corps de métiers dans le village, mais l’accessibilité et le manque de visibilité font qu’il est très difficile de vendre les créations, encore moins de voir des touristes”, explique Dior, adossée à une chaise en bois sculpté.
Tête baissée, les yeux sur le bracelet qu’elle est en train de réaliser, Dior s’arrête par moments, pour insister sur le peu d’exposition dont bénéficient les artisans du centre.
Des difficultés partagées par la plupart des occupants du village artisanal de Tambacounda, à l’image de Adama Touré, un artiste créateur spécialisé en art végétal et en teinture.
La saison des chasses est pratiquement le seul évènement “qui fait venir des touristes, c’est la seule période où les choses marchent un peu par ici”, dit-il, en montrant les différents articles exposés dans son atelier en case ronde couverte de pailles et qui peinent à trouver preneurs.
Touré propose dans son atelier des habits traditionnels confectionnés à partir de matières végétales, des portes clés et d’autres objets décoratifs. Des produits qu’il peine généralement à écouler.
“Souvent, on fait du commerce ambulant, dans les hôtels”, mais “une fois dans la rue, l’objet perd beaucoup de sa valeur, car il faut déballer, puis remballer, rien n’est évident dans tout ça”. Sans compter qu’au contact de la poussière, note-t-il, la plupart des articles perdent de leur éclat et de leur valeur.
A ses yeux, la région de Tambacounda, comparée aux autres régions, n’est pas bien appuyée dans ce domaine.
Il affirme que, lors de la dernière Foire internationale de l’agriculture et des ressources animales (FIARA), en mai-juin derniers, “la région n’a pas eu de stand” pour exposer ses articles, à ses yeux une preuve des difficultés de Tambacounda dans ce domaine.
Il a malgré tout salué les efforts que les autorités sont en train de faire pour rendre plus attrayant le cadre du village artisanal, devenu “très propre” grâce au Programme de modernisation des villes du Sénégal (PROMOVILLES) qui y a engagé des opérations de nettoiement.