Seulement cinq ans dans la politique, son nom est connu du grand public. Politiquement très engagée, Fatima Zahra Wagué évolue aussi dans l’auto-entrepreneuriat. Portrait de cette jeune militante du parti Pastef (Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité) d’Ousmane Sonko.
Le regard épuré par des lunettes. Elle n’apparait jamais en public sans le voile. Aujourd’hui, la native de Tamba est sous les feux de la rampe. Qui l’aurait cru ? En tout cas pas elle. Elle qui a arrêté l’école en classe de terminale.
La « vraie fille » du patriote en chef
C’est fin 2018 que Fatima a intégré le Pastef. Son histoire avec cette formation politique a débuté naturellement. Un jour, en scrollant sur la toile, la jeune dame tombe par hasard sur la photo du maire de Ziguinchor qui attire son attention. Depuis ce jour, elle décide alors de voter pour lui à l’élection présidentielle de février 2019. Election à laquelle Ousmane Sonko, porté par une coalition, est placé 3éme avec 15% des voix derrière Idrissa Seck.
Par la suite, elle est mise en contact avec le coordinateur du Pastef à Tambacounda Abdou Mbacké Samb et devient une militante. Durant ses premières réunions politiques, elle est la cadette du groupe avec ses 18 piges d’âge. C’est là qu’elle commence à se considérer comme la fille de Ousmane Sonko car voyant ce dernier comme son mentor, son « pater ». C’est tout le sens de ses sobriquets très connus « Zahra Bou Ousmane Sonko », « Zahra Domou Ousmane Sonko ». Des surnoms qui lui permettront de se faire remarquer sur les réseaux sociaux où elle n’hésite pas à hausser le ton pour défendre son leader.
L’intervention « excessive » devant le président Macky Sall
En fin décembre 2022, le président de la république est en tournée dans la région de Tamba. Au menu, des inaugurations, un conseil présidentiel, un conseil des ministres et « Jokko ak Macky » qui est une rencontre publique entre des jeunes de la région de Tambacounda et président Sall pour échanger sur leurs préoccupations. Quand arrive son tour de prendre la parole devant le chef de l’Etat, Zahra n’a pas flanché.
« Je suis originaire de cette région et j’en suis fière. Monsieur le président, il faut que vous souteniez les jeunes de Tambacounda dont la plupart s’adonne au taxijakarta qui n’est pas un métier décent. Le financement de projets destinés aux jeunes, nous à Tambacounda l’entendons seulement dans les autres régions. Il faut qu’on décentralise ces financements pour permettre aux jeunes du Sénégal oriental de pouvoir en bénéficier. Et d’ailleurs, pour bénéficier de ces mécanismes de financement comme la DER [ndlr Délégation à l’entrepreneuriat rapide des jeunes et des femmes], il faut militer dans l’APR [ndlr Alliance pour la république]. Cela est injuste(…) », avait-t-elle en substance dit devant une assistance calfeutrée dans un silence de cathédrale.
La vidéo de cette prise de parole musclée a engrangé sur Youtube 133.000 vues et 620 commentaires. Certains saluent la bravoure de la jeune militante. Quand d’autres, probablement des aficionados du parti au pouvoir, se colérent contre elle, l’accusant d’avoir fait subir un affront à leur chef de parti en tenant des propos qu’ils jugent « excessifs ». Ces piques, la « fille » politique de Sonko n’en a cure et estime qu’elle se devait d’interpeller le président de la république sur la précarité et la souffrance des jeunes de sa région.
5 mois 20 jours passés au pénitencier de Tambacounda
« Politique rime avec prison », dit-on souvent au Sénégal. Et Zahra en a fait l’expérience. En juillet 2023, elle est arrêtée et conduite au Commissariat de police de Tamba. Après des retours de parquet, elle est placée sous mandat de dépôt, inculpée des faits d’ « appel à l’insurrection, d’acte de nature à compromettre la sécurité publique ».
La pilule a du mal à passer. Surtout qu’elle estime être accusée à tort tout comme sont convaincus ses soutiens dont l’ex-premier ministre Mme Aminata Touré. Qui ont réclamé sa libération pendant tout le temps qu’elle croupissait à la Maison d’arrêt et de correction (Mac) de Tambacounda avec d’autres camarades de parti dont Abdou Mbacké Samb.
Après près de six mois de prison, la coordinatrice de la Jeunesse patriotique du Sénégal (JPS) section Tambacounda bénéficie d’une liberté provisoire. Dans un message de remerciement publié sur sa page Facebook, adressé à tous ceux qui l’ont soutenue durant son séjour carcéral, elle écrit: « Patriote un jour, Patriote pour toujours(…), nous sommes incassables ». Comme pour dire que l’emprisonnement n’a pas entamé son engagement politique.
De ce séjour carcéral, elle retient un côté positif : « J’ai vécu la prison avec dignité. La plupart du temps, je jeûnais. Je lisais aussi le Coran et je priais », se confie-t-elle dans une émission vidéo dont elle est l’invitée.
Au-delà de la politique, une femme d’affaire promotrice du consommer local
Celle qui rêvait de faire des études en journalisme et communication s’est lancée dans l’auto-entrepreneuriat dès le lycée avec la vente de hijabs.
Son emprisonnement est un coup de massue pour son autre activité, celle de commerce de savons faits à base de produits naturels locaux. Aujourd’hui, elle tente de faire redécoller le business. Mais son souhait, sans doute, le plus ardent reste l’élection de Bassirou Diomaye Diakhar Faye à la présidentielle du 24 mars prochain pour un Sénégal meilleur pour lequel elle se bat en politique.
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