Journaliste-reporter au Groupe Walfadjiri (Quotidien, radio et télévision), président de la Convention des jeunes reporters à Tambacounda, président du collectif des journalistes, correspondants régionaux de presse et ancien joueur, Assane Diallo alias Azou pour les intimes a été, durant des décennies, une véritable icône du mouvement Navétane. L’ex-pensionnaire des ASC Rail, Avenir, Rakadiou…est une voix autorisée pour parler des Navétanes au moment où sa ville natale, Tambacounda, s’apprête à accueillir les phases nationales 2014 de l’Oncav. Notre confrère, dans une position d’intervieweur interviewé, a abordé aussi d’autres questions. Alkuma.info vous donne l’exclusivité !
Par Maké DANGNOKHO
Tambacounda accueillera à partir du 16 septembre 2014, les phases nationales de l’ONCAV. Etes-vous optimiste quant à une participation qualitative des équipes de Tambacounda notamment celles de la Commune que vous suivez de près depuis quelques années ?
Ça sera vraiment la fête du football. Pour nos équipes, sachez que je ne suis pas du tout convaincu par le jeu produit par nos ASC qui vont représenter la région à ces phases nationales. Parce que tout simplement nos équipes ne sont pas à la hauteur, comparée à ce qui se passe dans les autres régions. Il reste beaucoup à faire sur le plan du jeu. C’est vrai que Tambacounda regorge de jeunes talents mais qui ne sont pas exploités. Ces jeunes joueurs ne sont pas bien encadrés. Pour ces Navétanes, la seule équipe qui a produit du beau football jusque là, c’est Mbollomi coaché par notre confrère, Boubacar Tamba. Nous avons une bonne aire de jeu mais le beau football n’est pas encore au rendez vous.
Est-il vrai que le football Tambacounda a perdu son lustre d’antan ? Si tel est le cas, le problème se situe à quel niveau ?
Ah oui le football de Tambacounda a tout perdu. Le problème se situe au niveau de la prolifération des ASC. Je dirai aussi que la race des grands joueurs comme Malick Niang, Ibrahima Ndiaye Rambo, Khalifa Kanté, Alassane Ba, Abdou Karim Diop, Aziz Ndiaye, Talla Ndao, Makhou Cissé, Tom Keita, Paul Diop entres autres Derdresse ou encore Vieux Camara a disparu.
L’autre problème se situe au niveau de l’encadrement des jeunes mais aussi les instances dirigeantes du mouvement Navétane. Pourquoi ? Parce que je ne peux pas comprendre dans un petit coin comme Dépôt ou Médina Coura, on retrouve 7 à 8 ASC. Ce n’est pas sérieux. Au dépôt, il n y avait que trois ASC à savoir Rail, Réal et Santos. A Médina coura deux équipes seulement Deggo et Rakadiou. Aujourd’hui nous sommes à 60 ASC pour 4 zones dans une petite commune.
On ne peut pas voir du beau football. Un joueur frustré qui n’a plus sa place dans une ASC, se lève un beau matin avec ses amis pour créer une équipe et les instances l’acceptent. Avec ça on ne peut pas avoir de bons matchs. Il faut que les dirigeants des instances revoient la création des ASC qui poussent comme des champignons.
Que vous inspire cette prolifération d’ASC dans les différents quartiers ou coins et recoins de la ville de Tambacounda ?
Je l’ai dit et redit. Il faut revoir ça. Il n y a plus du beau football à Tambacounda. J’ai assisté à des matches mais vraiment j’ai failli tomber à la renverse. On voit des jeunes qui n’ont jamais joué au football dans leur vie et qui ne peuvent même pas taper sur un ballon ou faire une passe. Des ASC qui n’ont même pas de maillots ni de godasses encore moins de ballons. Ils s’entrainent et jouent avec des ballons de 7.000F CFA. Des joueurs qui ne savent même pas porter de chaussures, ni contrôler un ballon. C’est une honte. Vous avez assisté avec moi à des matches au stade et vous avez vu le niveau qui est très très très faible.
Dans plusieurs villes du Sénégal les amateurs et responsables du football vont vers la mise en place d’un Club de ville, à l’image de Mbour et Rufisque…qui s’inspirent de quelques expériences réussies notamment le Casa Sport et l’ASC Pikine. Tambacounda doit-elle suivre cette même voie pour retrouver l’élite ?
Ce qui est tout à fait normal. On doit s’inspirer des autres villes du Sénégal. Mais je ne pense pas que ça puisse se réaliser à Tambacounda. C’est mon avis en tout cas. Nous sommes dans une ville où c’est très compliqué de faire regrouper tout le monde autour d’une table. Je me souviens, il n’y avait qu’une seule équipe à Tambacounda, le Niani. A un moment donné d’autres acteurs du ballon rond ont créé un autre club, du nom de Sodefitex parce que simplement certains ne se retrouvaient pas dans le Niani. Pourquoi ? Je ne saurai le dire. Mais ce que je peux vous dire chez nous les cœurs ne sont pas unis. Il sera très difficile de mettre sur pied un seul club de ville à Tambacounda.
Assane Diallo dirigeant ou coach d’une ASC ou d’un Club de Tambacounda est-il dans l’ordre du possible ?
Rires !!! Vous savez l’impossible n’existe pas chez Assane. Tout est possible. Avec le temps on verra.
Pouvez-vous nous citer deux ou trois matchs qui vous ont marqué durant votre carrière de footballeur ?
Les matches qui m’ont marqué durant ma carrière de joueur sont nombreux. Vous savez quand on joue au football, il faut être un guerrier et maîtriser les textes. Le premier match c’est Rail contre Rakadiou au stade régional. J’étais le gardien et capitaine de Rakadiou. Mon frère jumeau était de l’autre coté. Ce match a drainé du beau monde. Nos sœurs, frères, amis, voisins étaient tous ce jour là au stade. Les gens ne parlaient pas de Rail contre Rakadiou mais plutôt Ousseynou contre Assane. Les férus du ballon rond qui ont assisté à ce match vont se souvenir en lisant le texte. Il y avait une petite tribune qu’on appelait « paquet Marlboro ».
Le Rail avait la meilleure équipe de Tambacounda. Ils étaient bien lotis que nous malgré quelques potentialités comme Mbouyé Soumaré, Jean Dominique, Michel Malack et Talla Ndao entres autres. Le jumeau Assane Ndiaye officiait comme arbitre central. Il siffle un pénalty inimaginable à la 88e minute de jeu, au moment où le nul blanc se dessinait. Avec le pénalty, si le Rail marque les gens diront Ouzin a gagné Assane. Il fallait sortir le grand jeu pour arrêter le pénalty. Du coté du Rail chacun voulait tirer le pénalty et marquer. Finalement Oumar Diop qui était l’un des plus grands attaquants de Tambacounda a pris le ballon.
Je me suis rapproché de lui pour lui faire peur à coté de l’arbitre. J’ai été surpris quand l’arbitre m’a dit en ces termes « il faut l’arrêter sinon les supporteurs diront que Ouzin est meilleur que moi ». Avant le coup de sifflet de l’arbitre, j’ai pris le ballon et dit au tireur qu’il va perdre. Chose faite, je suis allé du bon coté et j’ai repoussé le ballon. Le match s’est soldé par un nul.
Le second match c’est Rail contre Salikénié en 1995 au terrain « crintin ». On jouait les demi-finales. C’était les deux plus grandes équipes de la région. Au regroupement, j’ai appelé notre Président Serigne Mbaye (Rail). J’étais le capitaine d’équipe. Je lui ai dit Président, le joueur de Salikénié, Souleymane dit Jules Sow ne va pas jouer le match. Il était surpris et dépassé. C’était un joueur exceptionnel. Je me disais même qu’il n’avait pas de cœur (rires). Il courait dans tous les sens. Il ne se fatiguait jamais.
Un jeune talentueux, capable de déstabiliser toute une défense de par sa technique, sa vivacité et en plus il était petit de par la taille. Donc, il fallait l’éliminer. Mais comment ? Du fait qu’il est qualifié. Il fallait mettre une stratégie sur place. A la présentation des deux ASC, j’ai enlevé la vignette de sa licence. Après la présentation des deux ASC, l’arbitre Idrissa Wane nous a demandés les deux capitaines (Thomas Kamara et moi), si on avait des réserves à formuler. Du coté de Salikénié, le capitaine n’avait pas de réserve. Quand l’arbitre m’a demandé, j’ai dit oui. Sur le motif de la réserve, j’ai évoqué l’absence de vignette de renouvellement sur la licence.
M Kamara qui n’en revenait pas, à fait appel à son entraîneur Pablo Kanté. L’information a fait le tour du stade. Les gens étaient surpris et n’en revenaient pas. Pendant une heure on n’arrivait pas à démarrer le match. Des dirigeants de Salikénié et supporteurs ont pris d’assaut le terrain. On m’insultait. J’étais même menacé. Ils avaient promis de me faire la fête. Même après le match, je n’osais pas sortir.
Pour le troisième match, c’est Rail contre Avenir. La veille du match, nous sommes allés à une soirée dansante Malick Niang et moi. Au regroupement, on nous a mis sur le banc. C’était une demi-finale et il fallait la gagner. A cinq minutes de la fin du match, entraîneur a procédé à un changement parce qu’il fallait recourir aux tirs au but. Les supporteurs se sont levés pour m’acclamer. C’est ainsi que j’ai arrêté deux tirs et le Rail a gagné. C’était un grand match joué dans un stade trop plein. Il y’en a encore plusieurs anecdotes à citer.
Pour revenir aux phases nationales 2014, la presse locale est-elle impliquée et quelle sera sa partition pour la réussite de l’événement ?
A vrai dire la presse locale n’est pas encore impliquée.
Votre rêve pour le football de Tambacounda dans les prochaines années ?
Il faut que tous les acteurs se mettent autour d’une table, discuter en impliquant tous les fils de Tambacounda, sinon ça restera toujours le même et rien ne va changer.
Pour parler d’autre chose, comment se porte la presse locale ?
La presse locale se porte très bien.
L’espace médiatique s’est renforcé ces dernières années à Tambacounda avec l’avènement des sites comme alkuma.info et xibartamba.com (dont vous êtes l’administrateur) à côté de leur grand frère tambacounda.info. N’est-ce pas une bonne chose aussi bien pour les autorités (administratives et locales), Ongs, projets, programmes, services… pour leur visibilité ?
Ah oui, une très bonne chose. Je lance un appel aux ONG, sociétés et autres entreprises à s’approcher des différents sites pour des espaces publicitaires. Le site ne nourrit pas son homme. C’est à travers les pubs qu’on arrive à faire quelque chose. Les administrateurs, les journalistes ne sont pas payés. Avec la presse en ligne, on n’y gagne rien. Aucun journaliste n’ est payé.
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