Par Marc Frank
LA HAVANE (Reuters) – Le ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius a rencontré samedi le président cubain Raul Castro, première visite d’un haut dirigeant français dans l’île communiste depuis 31 ans et illustration du réchauffement des relations entre l’Union européenne et La Havane.
Les deux hommes ont eu une “longue conversation”, a indiqué Laurent Fabius lors d’une conférence de presse à l’issue de sa visite d’une journée. Parmi les questions politiques abordées ont figuré les droits de l’homme, l’ouverture de l’économie cubaine vers le marché et les relations entre la France et Cuba.
Les deux pays veulent développer leurs relations dans les secteurs de la culture, de l’éducation, de l’économie et de la politique, a déclaré Laurent Fabius.
Il a reconnu que les points de vue divergeaient sur “certaines questions”, mais que cela n’empêchaient pas les deux pays “d’aller de l’avant”.
Le chef de la diplomatie française avait auparavant rencontré son homologue cubain Bruno Rodriguez, divers membres du gouvernement, le cardinal Jaime Ortega, archevêque de La Havane, et des hommes d’affaires français.
Laurent Fabius a souligné que de nombreuses entreprises françaises étaient déjà présentes à Cuba mais qu’il était “nécessaire que cette présence soit renforcée”. “Nos amis cubains sont d’accord”, a-t-il dit.
Depuis sa nomination au Quai d’Orsay en 2012, Laurent Fabius s’efforce d’axer davantage l’action diplomatique de la France vers la conclusion de contrats sur des marchés où les entreprises françaises sont traditionnellement faibles.
Paris cherche ainsi à étendre ses liens commerciaux avec l’Amérique latine et considère Cuba comme un acteur important dans la région.
RÉCHAUFFEMENT
Le commerce bilatéral franco-cubain s’est élevé l’an dernier à 280 millions d’euros, selon les chiffres du gouvernement français, constitué principalement par l’exportation de blé français vers l’île.
Bouygues, Pernod-Ricard, Accor ou encore Total ont tous investi à Cuba et figurent parmi la soixantaine d’entreprises françaises actives à Cuba.
La France mène également des efforts au sein du groupe de pays créanciers du Club de Paris pour rouvrir des négociations sur la dette cubaine, rompues depuis 2000.
Le voyage de Laurent Fabius s’inscrit plus généralement dans un contexte de réchauffement accru des relations entre Cuba et l’Union européenne.
En février dernier, l’UE a donné son feu vert à l’ouverture de discussions avec La Havane en vue d’un accord de coopération spécial permettant de développer les échanges commerciaux, l’investissement et le dialogue sur les droits de l’homme, geste le plus marquant vers l’île communiste depuis la levée des sanctions diplomatiques il y a six ans.
Les discussions doivent débuter le 29 avril à La Havane, selon des diplomates de l’UE.
Cuba, soumis à un embargo américain depuis un demi-siècle, espère obtenir la suppression de la “position commune” de l’UE, formulée en décembre 1996, qui établit un lien entre progrès démocratiques et renforcement des relations économiques.
Les deux parties doivent pour cela parvenir à un accord acceptable par l’ensemble des 28 pays membres de l’UE, y compris la Pologne et la République tchèque, réticentes en raison de leur propre passé communiste.
(Jean-Stéphane Brosse, Eric Faye et Danielle Rouquié pour le service français)